La revue de l’Association des Maires de France (AMF) a publié un interview de Monsieur Christophe IACOBBI. Cette publication est attentivement consultée nationalement et permet de mieux faire connaitre notre « petite » commune.
JM P
Source : Maires de France, n° 389, avril 2021, pp. 40-43. Autorisation de publication
Les maires face à à la complexité des fonds européens
S’armer de patience, ne rien lâcher, former une équipe de choc… et prendre de l’aspirine : alors qu’une nouvelle période de programmation est sur le point d’être lancée (2021-2027), trois maires nous racontent leur expérience de la gestion des fonds européens 2014-2020. Leurs récits révèlent l’urgente nécessité de simplifier les procédures.
Le 14 janvier 2021, Christophe Iacobbi, maire d’Allons (04, 155 hab.), reçoit deux émissaires de la région. Un représentant du service juridique et des fonds européens et la responsable de l’instruction de « son » dossier fonds structurels : la sauvegarde et la mise en valeur d’une tour de surveillance du XIe siècle et de la chapelle attenante. Un chantier d’une centaine de millier d’euros, financé à presque 40 % par le Feder (Fonds européen de développement régional).
Avec le maire, l’équipe régionale va passer en revue les factures du chantier, vérifier si les obligations de publicité édictées par l’Europe sont bien respectées et même s’assurer de visu de la réalité des travaux. Point presque final à une aventure commencée trois ans et demi plus tôt, quand Christophe Iacobbi décide de rechercher des financements pour restaurer ce patrimoine historique «avant qu’il ne s’écroule». «Pour arriver à des taux de co-financement de 80 %, il y avait cette association région-fonds européens. Alors on y est allé.»
Début d’un parcours qu’il décrit lui-même comme «chaotique» même si, au final, le maire se dit prêt à recommencer. «Si les fonds européens sont là, c’est pour qu’on puisse aller les chercher.»
Cependant, Christophe Iacobbi mesure vite la complexité pour y accéder.
«Remplir le dossier, ça a déjà été une bataille. On a dû s’y mettre à 4 personnes, en comptant l’architecte du chantier.» Des masses d’informations à soumettre, dont la finalité exacte reste obscure pour ce maire – pourquoi faut-il mentionner le nombre d’employés de la commune, si la secrétaire est à temps plein ou partiel, etc.? Après quelques allers-retours avec les services de la région, le dossier est retenu. « Beaucoup de paperasse mais ça va relativement vite. » Reste que pour Christophe Iacobbi, dont c’est la première expérience de gestion des fonds structurels, chaque étape apportera son lot de surprises. Par exemple, les exigences européennes liées aux procédures de marchés publics qui l’obligent à demander 3 devis par exemple – «nous, on n’était pas forcément parti là-dessus, mais pour l’Europe, un marché public de 10000 € ou d’1 M€ c’est la même chose». Le maire se rend compte aussi qu’il va devoir emprunter pour financer les travaux. Parce que, lui font comprendre d’autres maires, l’argent de Bruxelles met (toujours) du temps à arriver : deux ans après la fin du chantier, la commune n’a toujours pas encaissé les subventions européennes.
Ensuite, c’est la question des travaux à la charge de la commune (20 %) apportés grâce à une souscription publique lancée avec la Fondation du patrimoine – qui pose problème. Si le maire finit par avoir gain de cause sur son montage financier, c’est au prix de quatre mois de retard dans l’instruction du dossier… Plus tard, il a encore fallu justifier l’impossibilité de présenter des originaux de factures alors que celles-ci sont déposées sur un portail dématérialisé. Et, au final, l’impression de devoir toujours et toujours motiver, argumenter, reverser des pièces au dossier. « Chaque fois que l’on fournissait quelque chose, il fallait compléter.» Or, le maire de cette commune le dit aussi : « il faut allerchercher ces aides, car il ne faut pas que ces fonds ne soient destinésqu’aux collectivités plus structurées ».
« je cherche où est l’argent »
Dans sa recherche de subventions et le suivi du dossier, Christophe Iacobbi a toujours, et exclusivement, été en contact avec les services dédiés de la région. « Ils essaient vraiment de vous aider », salue-t-il, même s’il pense que les régions, aujourd’hui, « n’ont pas les structures pour soutenir des collectivités comme la mienne ». Sa communauté des communes (Alpes Provence Verdon) emploie désormais un chargé de mission affecté à la question des financements, ce qui n’était pas encore le cas lorsque le maire a initié son dossier. «Mais cette personne ne peut pas non plus monter individuellement chaque dossier. Ce qu’il faut, c’est monter un “groupe d’attaque” au niveau de la collectivité, et ne rien lâcher», conseille le maire. Qui «y retournera maintenant qu’on a acquis cette expérience. Mais en prenant de l’aspirine! »
À 650 km de là, ce n’est pas l’aspirine que préconise Sylvain Quoirin, maire de Venizy (89), commune d’un petit millier d’habitants…